Bulletin Officiel n°2002-41Direction générale de la santé
Sous-direction des pathologies
et de la santé
Bureau de l'alerte
et des problèmes émergents
Bureau DGS/SD 5 B

Circulaire DGS/SD 5 n° 2002-492 du 20 septembre 2002 relative à la transmission obligatoire de données individuelles à l'autorité sanitaire en cas de tularémie

SP 4 434
3306

NOR : SANP0230463C

(Texte non paru au Journal officiel)

Date d'application : immédiate.

Référence : décret n° 2002-1089 du 7 août 2002, paru au Journal officiel du 11 août 2002 et relatif à la transmission obligatoire de données individuelles à l'autorité sanitaire en cas de tularémie (signalement et notification).
Texte abrogé ou modifié : décret n° 99-363 du 6 mai 1999 modifié par le décret n° 2001-910 du 5 octobre 2001 paru au Journal officiel du 6 octobre 2001.

Le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées à Mesdames et Messieurs les préfets de région (directions régionales des affaires sanitaires et sociales [pour information]) ; Mesdames et Messieurs les directeurs des agences régionales de l'hospitalisation (pour information) ; Mesdames et Messieurs les préfets de département (directions départementales des affaires sanitaires et sociales [pour diffusion et mise en oeuvre])

I. - RAPPEL GÉNÉRAL
Contexte

La tularémie est une zoonose due à la bactérie Francisella tularensis. L'homme peut s'infecter à la suite d'un contact direct avec des animaux infectés ou des produits d'origine animale contaminés, par inhalation ou ingestion d'eau ou de particules du sol pouvant être contaminées par les déjections et les cadavres des animaux infectés, ou par la morsure d'une tique infectée. Il existerait également un mode de contamination, rare, par piqûre d'insectes (taons, moustiques), jamais décrit en France.
Les lagomorphes (lièvres, lapins) et les rongeurs, tels que les campagnols et les rats taupiers, sont les principaux réservoirs de la maladie humaine. De nombreuses autres espèces de mammifères peuvent être infectées, porteurs ou développer la maladie (renard, sanglier,...), et peuvent être à l'origine de contaminations humaines.

Agent étiologique

Francisella tularensis est une bactérie aérobie à Gram négatif, dont il existe quatre sous-espèces. La sous-espèce, Francisella tularensis tularensis (ou type A), retrouvée surtout aux Etats-Unis et dans le sud de la Russie, a fait son apparition dans la région de Bratislava en 1998, et provoque la forme la plus grave de tularémie. Elle n'a jamais été isolée dans les pays d'Europe occidentale. La sous-espèce Francisella tularensis holartica (ou type B), rencontrée en Europe et en France, s'avère nettement moins virulente que le type A. Les sous-espèces mediasiatica, rencontrée en Asie Centrale et en Russie, et japonica, exclusivement présente au Japon, sont, elles, à l'origine de formes bénignes de la maladie.

Origines de la contamination et manifestations cliniques et gravité

La maladie débute brutalement après 3 à 15 jours d'incubation par une forte fièvre, des frissons, une asthénie, d'éventuels troubles articulaires et musculaires, des céphalées et parfois des nausées et vomissements. Différentes formes cliniques existent, dépendant essentiellement de la porte d'entrée de l'agent causal :

La létalité et la gravité de la maladie dépendent de la sous-espèce en cause et de la dose infectante. La létalité des infections par des bactéries du type B, seul présent en France, est inférieure à 1 %. La létalité de l'infection par les bactéries du type A peut en revanche atteindre 30 à 35 % en l'absence de traitement, 7 % en cas de traitement tardif, et moins de 1 % en cas de traitement précoce.

Contexte particulier du bioterrorisme

Outre les origines naturelles exposées ci-dessus, la tularémie a été étudiée dans certains pays comme arme biologique pour être diffusée par voie aérienne. Son utilisation dans un but malveillant ou terroriste, par épandage d'un aérosol voire par contamination d'aliments ou du réseau de distribution d'eau, ne peut être exclue.

Contagiosité

En l'état actuel des connaissances, la transmission inter-humaine n'est pas documentée.

Diagnostic

L'isolement de Francisella tularensis est possible quoique difficile, à partir de prélèvements biologiques (sérosités de la plaie, ponction d'une adénopathie, exsudats dans les formes conjonctivales ou pharyngées, sang), après culture sur milieux enrichis. La séro-agglutination est un test précoce qui peut être utilisé en début de maladie. La réaction est considéré positive pour un titre en anticorps supérieur ou égal à 50, mais le sérodiagnostic de certitude repose sur le constat d'une augmentation du titre d'anticorps d'au moins quatre fois sur deux tests successifs. Le diagnostic de la tularémie par PCR ou Western Blot est réalisé par quelques laboratoires en France seulement.

Traitement

Le traitement des patients atteints de tularémie repose sur l'administration d'une fluoroquinolone pendant 14 jours ou d'une cycline durant 21 jours (voir fiche AFSSaPS sur son site Internet). D'autres antibiotiques peuvent être employés en fonction des résultats de l'antibiogramme. En cas de fistulisation ganglionnaire, un traitement chirurgical est associé au traitement antibiotique spécifique.
Un traitement antibiotique, identique au traitement curatif, peut également être débuté immédiatement en cas de forte suspicion de contamination (lien épidémiologique avec un cas confirmé, contact avec un lièvre mort dans une zone d'endémie).
Il n'existe pas de vaccin humain en France ni à l'étranger.

Tularémie professionnelle

En dehors des cas pris en charge au titre des accidents du travail, la maladie peut être reconnue en maladie professionnelle au titre du tableau n° 68 du régime général de la Sécurité sociale et du tableau n° 7 du régime agricole.

II. - SURVEILLANCE

La surveillance épidémiologique repose sur la notification des cas, sur l'envoi de la souche isolée au centre national de référence de la tularémie à l'AFSSA de Maisons-Alfort, pour identification du germe et typage des souches, et sur l'envoi du sérum au centre national de référence de la tularémie au laboratoire de microbiologie du centre hospitalier de Cahors : centre national de référence Francisella tularensis (tularémie), laboratoire d'études et de recherche en pathologie animale et zoonoses de l'AFSSA, unité des zoonoses bactériennes, 23, avenue Charles-de-Gaulle, B.P. 19, 94701 Maisons-Alfort Cedex, Dr Vaissaire (Josée), tél. : 01-49-77-13-00, courriel : j.vaissaire@afssa.fr, fax : 01-43-68-97-62, identification des Francisella tularensis d'origine humaine et investigations vétérinaires, alimentaires et environnementales autour des cas humains ; laboratoire associé Francisella tularensis (tularémie), centre hospitalier, 335, rue du Président-Wilson, B.P. 269, 46005 Cahors, Dr Le Coustumier (Alain), tél. : 05-65-20-50-75, courriel : lecoustumier@ch-cahors.fr, fax : 05-65-20-51-10, sérologie de la tularémie humaine et appui au diagnostic de la tularémie humaine.

La transmission obligatoire de données individuelles à l'autorité sanitaire

Le décret n° 2002-1089 du 7 août 2002, relatif au signalement et à la notification obligatoire des cas humains de tularémie paru au Journal officiel du 11 août 2002, a mis en place le signalement en urgence.
Tout docteur en médecine ou tout biologiste responsable d'un laboratoire ayant connaissance d'un cas doit le signaler sans délai au médecin inspecteur de santé publique (MISP) de la DDASS concernée, par téléphone ou par télécopie (ou tout autre moyen jugé pertinent). Lors du signalement, le MISP veillera à rechercher auprès du déclarant s'il existe des indices pouvant faire évoquer une origine malveillante à l'infection. Dans ce cas, il est nécessaire de saisir le procureur de la République.
En cas de signalement, et après avoir validé les informations du déclarant, le MISP doit immédiatement informer l'Institut de veille sanitaire : institut de veille sanitaire (InVS), département maladies infectieuses (DMI), 12, rue du Val-d'Osne, 94415 Saint-Maurice Cedex, Mailles (Alexandra), tél. : (33) 1 41-79-68-01, courriel : a.mailles@invs.sante.fr, Capek (Isabelle), tél. : (33) 1 41-79-67-70, courriel : i.capek@invs.sante.fr ; Vaillant (Véronique), tél. : (33) 1 41-79-67-33, courriel : v.vaillant@invs.sante.fr ; fax : (33) 1 41-79-67-69.
La notification sera réalisée à l'aide d'une fiche, non disponible à ce jour, qui sera publiée par arrêté dès que la CNIL aura donné son avis, conformément à l'article R. 11-2 du code de la santé publique.

III. - CONDUITE A TENIR

Parmi les différentes mesures à mettre en oeuvre autour d'un cas, il convient d'insister sur l'investigation qui a pour but de confirmer le diagnostic, d'identifier d'autres cas liés au signalement, d'identifier la source d'exposition et le mode de transmission, et de définir la population exposée afin de mettre en oeuvre les mesures de contrôle et de prévention adéquates.

Devant un cas humain de tularémie

1. Confirmer le(s) cas ;
2. Réaliser dans les meilleurs délais les investigations sur l'origine de la contamination en s'orientant à partir de la forme clinique (porte d'entrée), et en explorant des expositions liées à l'activité professionnelle (garde forestier, agriculteur), aux loisirs (chasse, randonnée, canyoning), à l'alimentation (consommation et préparation de gibier principalement) et les critères pouvant évoquer une origine malveillante. Un questionnaire standardisé est disponible à cet effet sur le site de l'InVS ;
3. Rechercher l'existence de cas dans l'entourage du patient ;
4. S'assurer de l'envoi de la souche au centre national de référence de la tularémie de l'AFSSA et/ou du sérum au laboratoire associé de la tularémie du centre hospitalier de Cahors ;
5. Informer la direction départementale des services vétérinaires ;
6. Identifier la population potentiellement exposée aux sources de contamination suspectées à l'issue de l'investigation du cas ;
7. Déterminer et mettre en oeuvre les mesures de contrôle et de prophylaxie individuelles et collectives adaptées ;
8. Faire procéder, le cas échéant (en fonction des éléments épidémiologiques de l'enquête), à des prélèvements environnementaux ou à des prélèvements alimentaires ;
9. Confronter les résultats des éventuels prélèvements animaux (réalisés par les services vétérinaires départementaux), des prélèvements alimentaires (DDASS) et des prélèvements environnementaux.

Circonstances impliquant une information en urgence
de la DGS et de l'InVS

La découverte d'un cas de tularémie pour lequel aucune source naturelle ne peut être rapidement suspectée, ou de plusieurs cas survenant dans un délai bref, doit conduire à une transmission immédiate de cette information à l'InVS (coordonnées ci-dessus), la CIRE, ainsi qu'à la direction générale de la santé : direction générale de la santé (DGS), sous-direction des pathologies et de la santé, bureau de l'alerte et des problèmes émergents (SD5B), DGS Alerte, tél. : (33) 1 40-56-57-84, fax : (33) 1 40-56-78-00, Courriel : Intranet : <DGS-ALERTE> ; Internet : <dgs-alerte@sante.gouv.fr> ; Pierre (Vincent), tél. : 01-40-56-51-41, courriel : vincent.pierre@sante.gouv.fr ; Segovia-Kueny (Sandrine), tél. : 01-40-56-59-65, courriel : sandrine.segovia@sante.gouv.fr, fax : 01-40-56-78-00.
Vous voudrez bien me tenir informé des éventuelles difficultés rencontrées dans l'application de la présente circulaire.

Le directeur général de la santé,
L. Abenhaïm