SANT4 - Bulletin Officiel N°2006-9: Annonce N°20




Circulaire DHOS/E2/DGS/5C no 2006-382 du 4 septembre 2006 relative aux recommandations de maîtrise de la diffusion des infections à Clostridium difficile dans les établissements de santé

NOR :  SANH0630386C

Textes de référence : articles R. 6111-12 à R. 6111-17 du code de la santé publique. Circulaire DHOS/E2 - DGS/SD 5C no 21 du 22 janvier 2004 relative au signalement des infections nosocomiales et à l’information des patients dans les établissements de santé.
Annexe : avis du comité technique des infections nosocomiales et des infections liées aux soins, relatif à la maîtrise de la diffusion des infections à Clostridium difficile dans les établissements de santé français.

Le ministre de la santé et des solidarités à Mesdames et Messieurs les directeurs des établissements de santé (pour exécution) ; Mesdames et Messieurs les directeurs des agences régionales de l’hospitalisation (pour information) ; Mesdames et Messieurs les préfets de région (directions régionales des affaires sanitaires et sociales [pour information]) ; Mesdames et Messieurs les préfets de département (directions départementales des affaires sanitaires et sociales [pour information et diffusion]).
    Dans le cadre du dispositif national de signalement des infections nosocomiales, depuis le début de l’année 2006, 13 établissements de santé et 2 établissements pour personnes âgées de la région Nord - Pas-de-Calais ont signalé des cas groupés d’infection digestive liée à Clostridium difficile (ICD). En avril 2006, une souche particulière de Clostridium difficile 027 a été mise en évidence. Fin août 2006, ces épisodes ont concerné un total de 227 patients adultes, majoritairement des personnes âgées (14  décès sont partiellement imputables à l’infection). Parmi eux, neuf épisodes sont liés à une souche de Clostridium difficile dite « 027 ». Cette souche est particulièrement virulente, responsable d’infections sévères et épidémiques. Bien qu’aucune autre région n’ait jusqu’à présent signalé de cas d’ICD liée à la souche 027, il ne peut être exclu que des cas isolés soient survenus.
    L’évolution des signalements est suivie de façon rapprochée par l’InVS, informations complémentaires : [http://www.invs.sante.fr/display/?doc=presse/2006/le_point_sur/clostridium_difficile_280806/index.html]
    Le phénomène constaté dans la région Nord - Pas-de-Calais se situe dans un contexte d’augmentation globale des infections à Clostridium difficile dans plusieurs pays ainsi que l’émergence de cette souche 027 particulièrement virulente. Cette augmentation du nombre de cas d’ICD liées à la souche 027 et du nombre d’établissements touchés a d’abord été décrite en Amérique du Nord (USA, Canada en 2002 et 2003), et dans des pays européens depuis 2004 (Grande-Bretagne, Pays-Bas et Belgique). Ces données confirment l’émergence et la diffusion progressive des infections à Clostridium difficile 027 et attestent du potentiel épidémique de cette souche.
    Dans ce contexte, nous vous demandons de diffuser l’information sur ce risque infectieux auprès des professionnels de santé de votre établissement, en particulier :
    -  des services cliniques les plus concernés (médecine, gériatrie, réanimation, soins intensifs, maladies infectieuses, soins de suite et réadaptation, longs séjours) ;
    -  des laboratoires de microbiologie ;
    -  des membres de la CME ;
    -  du CLIN, ou de l’instance chargée de la lutte contre les infections nosocomiales ;
    -  de l’équipe opérationnelle d’hygiène ;
    -  de la commission des antibiotiques.
    Il est nécessaire que les professionnels des services cliniques soient sensibilisés à ce risque et qu’ils demandent systématiquement en cas de doute au laboratoire de microbiologie la recherche de Clostridium difficile. Cette recherche peut être effectuée par un test de diagnostic rapide (recherche des toxines A et B dans les selles), celui-ci devant être disponible dans les laboratoires de microbiologie afin de permettre un rendu du résultat dans les 24 heures.
    Dès que le diagnostic d’ICD est confirmé, il doit être signalé à l’équipe opérationnelle d’hygiène hospitalière (EOHH) et au CLIN ou à l’instance chargée de la lutte contre les infections nosocomiales. Ce signalement interne sera analysé par l’EOHH qui recherchera d’autres cas, vérifiera les pratiques de soins et d’hygiène dans le(s) service(s) concerné(s) et les mesures de contrôle mises en oeuvre.
    La personne chargée du signalement des infections nosocomiales dans votre établissement veillera à ce que la survenue de cas groupés ou d’infection sévère à Clostridium difficile fasse l’objet sans délai d’un signalement externe au CCLIN et à la DDASS (cf. note 1) et d’une recherche systématique d’une souche 027 (liste des laboratoires de référence disponibles sur le site de l’InVS et du CCLIN).
    Les mesures de contrôle adaptées qui doivent être rapidement instituées reposent sur :
    -  l’isolement géographique du patient ;
    -  la mise en oeuvre de précautions « contact » ;
    -  l’hygiène des mains associant lavage et antisepsie ;
    -  l’utilisation de matériel à usage unique ou dédié au patient ;
    -  le bionettoyage à l’eau de Javel de son environnement (sols et surfaces) ;
    -  la limitation du transfert intra ou inter-établissement d’une personne symptomatique aux situations qui l’exigent ;
    -  par ailleurs les patients devenus asymptomatiques peuvent être transférés, sous réserve d’informer les services qui les accueilleront des antécédents infectieux à Clostridium difficile et des risques de transmission croisée. L’objectif est de rester vigilant et que les mesures de contrôle puissent êtres mises en place en cas de reprise des signes cliniques. Si la personne retourne dans une structure d’hébergement (maison de retraite, EHPAD, foyer-logement), ces mêmes informations doivent être communiquées au médecin traitant et au médecin coordonnateur de la structure, de même qu’au médecin référent s’il s’agit d’un retour à domicile.
    Si, malgré la mise en oeuvre de ces recommandations, la situation n’est pas rapidement maîtrisée, vous devez faire appel à l’expertise du CCLIN afin d’évaluer les mesures de contrôle en place et la nécessité de leur renforcement.
    La survenue de cas groupés nécessiterait de plus :
    -  le regroupement géographique des patients infectés ;
    -  la mise en place de personnel dédié à leur prise en charge ;
    -  la limitation des admissions dans le service ;
    -  si nécessaire la fermeture du service.
    Différents outils ont été spécifiquement élaborés pour aider les établissements pour le contrôle de la diffusion des infections à Clostridium difficile :
    -  une conduite à tenir réalisée par l’InVS : http://www.invs.sante.fr/publications/2006/guide_raisin/conduite_clostridium_difficile.pdf (version 8.1 - 28 mai 2006) ;
    -  un avis du comité technique des infections nosocomiales et des infections liées aux soins, relatif à la maîtrise de la diffusion des infections à Clostridium difficile dans les établissements de santé français, adopté le 21 août 2006 (annexe).
    -  une fiche technique disponible sur le site du CCLIN Paris Nord : http ://www.cclinparisnord.org/ACTU_DIVERS/MesuresClostridium.pdf.
    
La prévention des ICD repose avant tout sur la politique de bon usage des antibiotiques. Dans ce cadre, la commission des antibiotiques de votre établissement a un rôle important à jouer en contribuant à l’étude des pratiques d’antibiothérapie pouvant conduire à la survenue de telles infections, en élaborant des préconisations sur leur bon usage et en diffusant les recommandations existantes.
    Il vous appartient de vérifier que les différentes recommandations sont accessibles aux professionnels concernés et par ailleurs, de vous assurer du respect des précautions standard, protocoles d’isolement et de nettoyage des surfaces. Les conditions de transfert de patients infectés doivent faire l’objet d’une attention particulière.
    Nous vous demandons, afin d’anticiper sur la survenue de cas sévères ou groupés d’infections à Clostridium difficile dans votre établissement, de réunir sans délai les responsables du CLIN, de l’EOHH, de la commission des antibiotiques et de la CME aux fins de :
    -  vérifier que les conditions pour leur diagnostic sont réunies ;
    -  rappeler le signalement interne des cas et l’obligation de signalement de cas groupés ou sévères ;
    -  rédiger un protocole de gestion interne en cas de survenue de cas sévères ou groupés ;
    -  saisir la commission des antibiotiques de votre établissement pour renforcer la politique de bon usage des antibiotiques de votre établissement ;
    -  organiser et s’assurer d’une information immédiate des responsables des services cliniques.
    Vous voudrez bien nous tenir informés des difficultés rencontrées pour la mise en oeuvre de ces mesures.

Pour le ministre et par délégation :
Le directeur de l’hospitalisation
et de l’organisation des soins,
J.  Castex

Le directeur général de la santé,
D.  Houssin

MINISTÈRE DE LA SANTÉ
ET DES SOLIDARITÉS
Direction générale de la santé

ANNEXE  

Avis du comité technique des infections nosocomiales et des infections liées aux soins relatif à la maîtrise de la diffusion des infections à Clostridium difficile dans les établissements de santé français adopté le 21 août 2006
    Considérant que :
    Du point de vue de l’épidémiologie :
    1.  C. difficile est responsable de 15 % à 25 % des diarrhées post-antibiotiques, de plus de 95 % des cas de colites pseudomembraneuses (CPM) [1-3], et est la première cause de diarrhées infectieuses nosocomiales chez les adultes [4-7] ; les infections à C. difficile (ICD) diagnostiquées à l’hôpital sont d’origine nosocomiale dans plus de 70 % des cas [8], survenant volontiers sous forme d’épidémies dans des services à risque (réanimation, maladies infectieuses, hématologie et gériatrie) [9-11] ;
    2.  L’incidence des ICD à l’hôpital varie de 1 à 10 pour 1 000 admissions [8, 12-14] ;
    3.  Depuis 2 ans, les Etats-Unis et le Canada ont constaté une augmentation de l’incidence des ICD, surtout chez les patients de plus de 65 ans [15], une augmentation de la sévérité des formes cliniques (dans 10 à 20 % des cas), une létalité multipliée par 3 atteignant près de 14 %, une moins bonne réponse aux traitements par métronidazole [161] ; cette souche 027 a également diffusé en 2005 en Europe, à l’origine d’épidémies en Belgique, au Royaume-Uni et aux Pays-Bas [17-19] ;
    4.  Cette évolution est liée à l’émergence et à la dissémination rapide sous forme épidémique d’un clone particulièrement virulent de C. difficile, dénommé 027 en référence à son profil par PCR-ribotypage, qui représente désormais deux tiers de l’ensemble des souches isolées au Québec et la moitié dans plusieurs hôpitaux des Etats-Unis [16] ;
    5.  Cette souche 027 a été isolée dans quelques établissements de santé français en 2005 [20], et est actuellement à l’origine d’une situation épidémique signalée dans la région Nord - Pas-de-Calais [21].
    Du point de vue du risque infectieux pour les patients :
    6.  La mortalité imputable à l’infection par C. difficile varie de 0,6 % à 1,5 %, mais atteint 35 % à 50 % en cas de complications de CPM [12,22] ;
    7.  La présence de C. difficile reste asymptomatique au moins deux fois sur trois et les porteurs sains représentent un réservoir de germes qui contribue à leur dissémination dans l’environnement [9,23,24] ;
    8.  Seules les souches toxinogènes de C. difficile sont pathogènes [25,26] ;
    9.  La contamination à C. difficile a lieu par voie oro-fécale et la transmission de personne à personne s’effectue directement par manuportage ou à partir de l’environnement contaminé ;
    10.  en milieu hospitalier, la facilité d’acquisition de C. difficile s’explique par :
    -  la très forte dissémination des souches dans l’environnement des patients ayant une ICD [236] ;
    -  la résistance élevée et la persistance prolongée des spores de C. difficile sur des supports inertes, l’environnement constituant ainsi un réservoir très important [9,23,27,28] ;
    -  la promiscuité des patients [23] ;
    -  la pression de sélection par les antibiotiques, responsable d’une diminution de la résistance à la colonisation qui favorise l’acquisition et l’implantation de C. difficile [29,30]. Les antibiotiques incriminés sont les céphalosporines de 2e et 3e génération [31], la clindamycine [32], les macrolides [33], l’amoxicilline + acide clavulanique [34], les fluoroquinolones [16,31,32,35,36] ;
    -  le retard à la mise en place de mesures de prévention de sa dissémination ;
    11.  Le retrait de l’antibiotique responsable conduit dans 25 % des cas à une guérison en 2 à 3 jours ;
    12.  En ce qui concerne le traitement des infections à Clostridium difficile, à efficacité clinique comparable avec la forme orale de la vancomycine, le métronidazole est moins coûteux, présente un risque plus faible de sélectionner des bactéries résistantes aux glycopeptides, et existe sous forme injectable intraveineuse ;
    13.  L’isolement de la souche par culture est une étape préalable indispensable pour pouvoir caractériser un clone épidémique ;
    14.  La souche 027 est responsable d’une hyperproduction de toxines A et B ;
    15.  Tout laboratoire doit être en mesure de réaliser un diagnostic rapide d’ICD par l’utilisation de tests immuno-enzymatiques détectant les toxines A et/ou B et d’isoler et identifier C. difficile ;
    16.  Le diagnostic de certitude du clone épidémique 027 repose sur l’identification de son profil par PCR-ribotypage et est réalisé par le Centre national de référence des anaérobies et son réseau de laboratoires experts.
    Du point de vue de la prévention des cas :
    17.  Le traitement antibiotique des porteurs sains de C. difficile est inefficace pour éradiquer définitivement cette bactérie du tube digestif [37] ;
    18.  Les précautions « contact » ne s’appliquent qu’aux patients symptomatiques ;
    19.  L’usage des gants s’accompagne d’une diminution significative de l’incidence des diarrhées à C. difficile [38] ;
    20.  Les produits utilisés pour l’hygiène des mains ont une efficacité modérée sur les spores de C. difficile (savons doux, savons antiseptiques) voire nulle (produits hydro-alcooliques) et seule l’action mécanique du lavage semble efficace pour éliminer la présence de la bactérie sporulée sur les mains des soignants ;
    21.  Aucune étude ne permet aujourd’hui de suspecter que l’augmentation de l’incidence des ICD, observée dans certains pays, est liée à une augmentation de l’usage des produits hydro-alcooliques [39] ;
    22.  L’eau de Javel est le désinfectant de référence pour la désinfection des surfaces contaminées par C. difficile [40].
    23.  La survenue d’épidémies d’ICD est souvent favorisée par la méconnaissance de l’infection, par l’identification retardée des cas groupés et par les difficultés microbiologiques à identifier l’émergence d’un clone épidémique ;
    24.  Le signalement des infections nosocomiales (décret du 26/07/01) est un outil parfaitement adapté pour la vigilance et l’alerte de ce type d’événements.
    Le comité technique des infections nosocomiales et des infections liées aux soins recommande :
    D’une part, au plan de la prévention, de la prise en charge et du contrôle :
    Pour la prise en charge des patients :
    1.  D’évoquer le diagnostic d’ICD devant la présence de toute diarrhée post-antibiotique (diarrhée simple), mais aussi en cas d’iléus accompagné de fièvre, de douleurs abdominales et d’hyperleucocytose (CPM), particulièrement chez les patients âgés avec antécédents de traitement antibiotique dans le mois précédent ;
    2.  De mettre en place une surveillance active et prospective des diarrhées nosocomiales avec recherche systématique de toxines de C. difficile dans les selles de tout patient adulte présentant une diarrhée débutant au moins 48 heures après son admission, en utilisant les tests de diagnostic rapide qui détectent les deux toxines A et B simultanément [4,41].
    3.  Dès le diagnostic rapide d’ICD réalisé, de mettre en place rapidement des mesures adaptées : précautions « standard » et précautions complémentaires d’hygiène de type « contact ».
    4.  Notamment de porter une surblouse à manches longues, lors des contacts directs avec le patient ou ses excréta, s’il est atteint de diarrhée ou s’il est porteur d’une stomie ou incontinent, ou avec son environnement. Mise en place dès l’entrée dans la chambre et retirée avant de la quitter, elle sera complétée par un tablier en plastique imperméable en cas de soins « mouillants » [42] ;
    5.  De pratiquer l’hygiène des mains, en maintenant les efforts de sensibilisation des soignants à l’usage des produits hydro-alcooliques, et de porter des gants, en respectant les consignes suivantes :
    -  une fois entré dans la chambre, se désinfecter les mains par friction avec un produit hydro-alcoolique avant de porter des gants à usage unique (stériles ou non stériles selon le geste à réaliser),
    -  avant de quitter la chambre, jeter les gants et faire un lavage simple des mains au savon doux (éliminer les spores) puis, après un séchage complet, se désinfecter les mains par friction avec un produit hydro-alcoolique (pour éliminer les formes végétatives résiduelles et toutes les autres bactéries, notamment les BMR) ;
    6.  De procéder rapidement à l’évacuation des selles : pour les personnes incontinentes, par élimination des protections dans la filière DASRI ; pour les personnes continentes par l’utilisation des laves-bassins ou à défaut l’évacuation des selles dans le réseau d’assainissement suivi de la désinfection immédiate du bassin avec de l’eau de Javel ;
    7.  D’arrêter l’antibiotique responsable et de débuter systématiquement un traitement par métronidazole (1 g/j) en première intention, sauf chez la femme enceinte ou allaitante, ou en cas d’antécédent connu d’intolérance au métronidazole ; dans ces derniers cas ou en cas d’échec du métronidazole de recourir à la vancomycine per os (125 mg 4 fois par jour) ; si l’arrêt du traitement antibiotique responsable n’est pas envisageable, substituer par un antibiotique plus rarement impliqué dans la survenue d’une diarrhée post-antibiotique (aminoglycosides, sulfonamides, macrolides, vancomycine, tétracycline) ;
    Dans l’environnement du patient :
    8.  De réduire de façon rapide et drastique le réservoir de spores de C. difficile dans l’environnement, par l’application de mesures spécifiques de désinfection des locaux et surfaces, en réalisant un bionettoyage au moins quotidien des sols et des surfaces de la chambre du patient infecté ou colonisé comportant impérativement :
    -  un nettoyage complet (détersion, rinçage) avec du matériel à usage unique, terminé par un séchage passif ;
    -  suivi d’une désinfection à l’aide d’une solution d’hypochlorite de sodium à 0,5 % de chlore actif, c’est-à-dire de l’eau de Javel diluée au 1/5e (1 litre d’eau de Javel à 2,6 % et 4 litres d’eau pour un volume final de 5 litres ou 250 ml de la solution à 9,6 % d’un berlingot et 4,5 l d’eau), en respectant un temps de contact minimum de 10 minutes [43] ; si le matériau ne permet pas l’utilisation de l’eau de javel, il est recommandé de réaliser un bionettoyage toutes les 8 heures en utilisant le produit détergent-désinfectant en usage dans l’établissement ;
    9.  D’utiliser de préférence du petit matériel de soin à usage unique qui sera éliminé dans la filière DASRI ; en cas d’impossibilité de recours à l’usage unique, de dédier à un seul patient infecté ou colonisé, le petit matériel en contact direct (stéthoscope, brassard à tension, thermomètre, flacons d’antiseptique...) maintenu en permanence dans sa chambre jusqu’à la levée des mesures complémentaires et désinfecté au moins une fois par jour selon les procédures en vigueur dans l’établissement ;
    Des mesures générales :
    10.  D’informer le personnel médical et paramédical, les patients et les visiteurs sur les risques de transmission manuportée de C. difficile et sur les précautions « contact » à mettre en oeuvre ;
    11.  D’apposer sur la porte de la chambre une signalisation claire, mentionnant précisément les précautions à observer ;
    12.  De mettre en place impérativement un isolement géographique des patients symptomatiques dans des chambres individuelles ou de regrouper les patients infectés dans le même secteur et avec du personnel médical et paramédical dédié ;
    13.  De proscrire la présence dans une même chambre de patient(s) infecté(s) et de patient(s) indemne(s) ;
    14.  De limiter les déplacements des patients infectés au strict nécessaire, et notamment d’éviter les transferts de patients symptomatiques ;
    15.  De maintenir les mesures d’isolement géographique et l’application des précautions « contact » jusqu’à la fin de l’épisode diarrhéique ; l’arrêt de la diarrhée doit s’accompagner d’une désinfection minutieuse des surfaces en utilisant de l’eau de Javel ;
    16.  D’informer les patients sortants afin de les sensibiliser à l’apparition de signes cliniques compatibles d’ICD nécessitant de consulter ;
    D’autre part, au plan de l’organisation de la surveillance, du signalement, de l’investigation et des prescriptions :
    18.  D’isoler C. difficile par culture des selles en anaérobiose dès la connaissance d’un cas sévère d’ICD ou la reconnaissance de l’épidémie ; l’établissement prendra contact avec l’un des laboratoires experts du réseau constitué autour du CNR Anaérobies pour transmission des souches isolées et expertise en vue de déterminer leur éventuelle appartenance au clone épidémique 027. A défaut de pouvoir la réaliser localement, l’établissement de santé sous-traitera cette culture de selles au laboratoire le plus proche ; les selles devront être conservées à 4 °C maximum (si l’envoi peut se faire dans les 48 heures) ou congelées (si l’envoi ne peut se faire avant 48 heures) ;
    19.  Que l’équipe opérationnelle d’hygiène hospitalière (EOHH) et/ou le Clin soi(en)t tenu(s)e informée(s) par le laboratoire de microbiologie ou un service clinique, d’une augmentation jugée anormale du nombre de diarrhées nosocomiales, et de chaque cas de recherche de toxine A/B positive, ou d’isolement de C. difficile ;
    20.  De signaler sans délai, et notamment sans attendre la fin des investigations, au CClin et à la Ddass, conformément au décret du 26/07/2001 [44] et à la circulaire du 22/01/2004 [45], en précisant le besoin éventuel d’une expertise extérieure :
    a)  Tout cas sévère d’ICD nosocomiale (cf. annexe) ;
    b)  Tout cas groupés ou épidémie d’ICD ;
    21.  Que l’EOHH en collaboration avec le laboratoire de microbiologie et le(s) service(s) clinique(s) concerné(s), mène une investigation de l’épidémie adaptée à la spécificité des ICD ;
    22.  En cas d’épidémie, de ne pas réaliser systématiquement un dépistage des patients asymptomatiques à la recherche de C. difficile et de ne pas traiter systématiquement les porteurs sains déjà identifiés ;
    23.  Le transfert d’un patient asymptomatique en provenance d’un service concerné par une épidémie d’ICD ne justifie pas dans le service d’accueil de dépistage à la recherche de C. difficile ou de ses toxines dans les selles. Il est par contre recommandé de surveiller étroitement l’état clinique de ce patient et de demander une telle recherche dès l’apparition de symptômes évocateurs d’ICD (cf. reco 1) ;
    24.  En cas d’épidémie, que l’EOHH mette en oeuvre dans le(s) service(s) concerné(s) la revue des pratiques de soins et d’hygiène, avec l’appui du CClin et de leurs antennes, si nécessaire, en ciblant tout particulièrement la mise en place des précautions « contact », l’hygiène des mains et le bionettoyage des locaux, et la revue des pratiques d’antibiothérapie, en lien avec la commission des antibiotiques de l’établissement et le(s) référent(s) antibiotique ;
    25.  En cas de situation non maîtrisée, de faire appel à une expertise extérieure (CClin ou leurs antennes), d’évaluer la mise en oeuvre des mesures de prévention précédemment recommandées, de décider de leur éventuel renforcement (réduction des admissions ou fermeture d’un service, par exemple), d’approfondir les investigations (enquête analytique de type cas témoin ou cohorte rétrospective) ;
    26.  D’actualiser ou de mettre en place sans attendre et de façon pérenne une politique raisonnée de prescription des antibiotiques visant notamment à réduire la prescription des antibiotiques à risque (céphalosporines de 2e et 3e génération, clindamycine, macrolides, l’association amoxicilline + acide clavulanique, fluoroquinolones) [32,46-48], et qui comportera entre autre la mesure de la consommation de ces antibiotiques, exprimée en doses définies journalières (DDJ) pour 1 000 journées d’hospitalisation et étudiée de manière rétrospective pour l’année ayant précédé l’épidémie ;
    27.  En cas de maîtrise de l’épidémie, de maintenir une surveillance renforcée et de signaler à l’EOHH tout nouveau cas pouvant être relié à l’épisode précédent.
    Cet avis ne peut être diffusé que dans son intégralité sans suppression ni ajout.

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ANNEXE  
DÉFINITION D’UNE ICD SÉVÈRE

    Un patient atteint d’ICD qui réunit au moins un des critères suivants :
    -  si d’origine communautaire, admission dans un établissement de santé pour traitement de l’ICD ;
    -  admission dans une unité de réanimation pour traitement de l’ICD ou de ses complications (par exemple, choc nécessitant le maintien des fonctions vitales) ;
    -  hyperleucocytose (≥ 20 000/mm3)
    -  chirurgie (colectomie) pour mégacolon, performation ou colite réfractaire ;
    -  décès dans les 30 jours qui suivent le début des symptômes si l’ICD est la cause initiale ou associée du décès. L’appréciation du caractère imputable à l’ICD fera appel à une revue de mortalité associant le clinicien en charge du patient et le praticien de l’équipe opérationnelle d’hygiène.

NOTE (S) :


(1) Décret no 2001-671 du 26 juillet 2001 relatif à la lutte contre les infections nosocomiales dans les établissements de santé et modifiant le code de la santé publique (deuxième partie : décrets en Conseil d’Etat) et circulaire DHOS/E2 - DGS/SD. 5C no 21 du 22 janvier 2004 relative au signalement des infections nosocomiales et à l’information des patients dans les établissements de santé