SANT4 - Bulletin Officiel N°2007-9: Annonce N°279


MINISTÈRE DE LA SANTÉ
ET DES SOLIDARITÉS
MINISTÈRE DE L’ÉCOLOGIE
ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE
MINISTÈRE DE L’ÉQUIPEMENT,
DES TRANSPORTS, DU LOGEMENT,
DU TOURISME ET DE LA MER
Direction générale de la santé

Direction de la prévention
des pollutions et des risques

Direction générale de l’urbanisme
de l’habitat et de la construction


Circulaire interministérielle DGS/EA1/DPPR/DGUHC no 2007-317 du 8 février 2007 relative à l’implantation sur des sols pollués d’établissements accueillant des populations sensibles

NOR :  SANP0730930C

1.  Contexte

    La politique française en matière de sites et sols pollués, proche de ce que pratiquent les autres pays européens, s’appuie sur deux concepts principaux :
    -  l’examen du risque plus que celui d’un niveau de pollution intrinsèque ;
    -  la gestion des sites en fonction de l’usage auquel ils sont destinés.
    Le ministère de l’écologie et du développement durable a la charge de la définition des politiques publiques en la matière. Aussi, depuis une dizaine d’années, différentes instructions ministérielles et des outils de gestion, au travers d’un ensemble de guides, ont-ils été mis à la disposition des différents acteurs. Ils s’adressent aussi bien à la gestion des sites relevant de la législation sur les installations classées qu’aux projets immobiliers pour lesquels les enjeux consistent avant tout à garantir des aménagements qui soient sains pour leurs occupants au regard des polluants susceptibles d’être présents dans les sols, que la pollution soit d’origine anthropique ou naturelle.
    Par ailleurs, le ministère de l’écologie et du développement durable est en charge de la législation relative aux installations classées, et vous êtes chargé de la police administrative instituée par cette législation qui vise à encadrer par des prescriptions réglementaires un certain nombre d’installations reconnues comme génératrices a priori de nuisances ou de risques particuliers, tant pendant la phase d’exploitation que lors de la cessation d’activité.
    Si les services de l’Etat n’ont pas vocation à réglementer toutes les opérations de réhabilitation, en dehors du processus de changement d’usage consécutif à la cessation définitive d’activité des installations classées, dans le cas particulier de la création d’établissements accueillant des populations sensibles, ils pourront être sollicités en qualité de conseils compte tenu de leur expérience.

2.  Champ de la circulaire

    Le retour d’expérience sur quelques dossiers récents impose de réserver aux établissements suivants un traitement prioritaire :
    -  crèches, écoles maternelles et élémentaires, établissements hébergeant des enfants handicapés relevant du domaine médico-social, ainsi que les aires de jeux et espaces verts qui leur sont attenants,
    -  collèges et lycées, ainsi que les établissements accueillant en formation professionnelle des élèves de la même tranche d’âge.
    Vous trouverez à l’annexe I le détail des réflexions qui ont conduit à définir les populations sensibles visées par cette circulaire et à retenir ces établissements.
    Les instructions de la présente circulaire s’appliquent uniquement à ces catégories d’établissements dès lors que leur création (implantation et/ou construction) ou leur extension est en projet. En effet, le cas des établissements existants fera l’objet d’instructions postérieures, en cohérence avec l’action 29 du PNSE (plan national santé environnement), relative à la qualité des bâtiments accueillant des enfants, en fonction des conclusions du groupe de travail constitué à cet effet. Un guide méthodologique pertinent sera élaboré à l’intention des gestionnaires de ces établissements.

3.  Etablissements en projet : méthodologie

    La construction de ces établissements doit être évitée sur les sites pollués, notamment lorsqu’il s’agit d’anciens sites industriels.
    Ce principe doit prévaloir quelle que soit la nature des polluants.
    Le maître d’ouvrage du projet consultera utilement les archives détenues en préfecture, en mairie, aux bureaux des hypothèques, etc., y compris les inventaires nationaux actuellement disponibles pour connaître le passé du site sur lequel la construction est envisagée. Ces inventaires sont répertoriés à l’annexe II.
    En fonction des renseignements obtenus, le bon sens doit prévaloir, sans qu’il y ait lieu de procéder à des analyses environnementales approfondies, et la construction de ces établissements doit être évitée sur de tels sites même dans le cas où des calculs démontreraient l’acceptabilité du projet.
    Toutefois, compte tenu de contraintes urbanistiques ou sociales,il peut advenir qu’un site alternatif non pollué ne puisse être choisi. Une telle impossibilité mérite néanmoins d’être étayée par un bilan des avantages et inconvénients des différentes options de localisation.
    Dans une telle situation, l’annexe III de la présente circulaire propose aux maîtres d’ouvrage un ensemble de mesures dont la mise en oeuvre est fortement recommandée pour répondre pleinement aux enjeux liés à de tels projets. Ces mesures, détaillées dans le « guide relatif aux modalités de gestion et de réaménagement des sites pollués », comprennent notamment les phases suivantes : un diagnostic préalable ; des opérations de dépollution, complétées par des particularités constructives lorsque des pollutions résiduelles persistent (par exemple : vide sanitaire systématique si les polluants sont susceptibles de dégager des vapeurs toxiques) ; une évaluation quantitative qui, par le calcul, doit permettre de conclure à l’acceptabilité des risques liés aux pollutions résiduelles ; un plan de surveillance le cas échéant ; une information pertinente et ciblée.
    Ces recommandations, dans l’esprit de l’action 29 du PNSE, seront reprises dans un guide méthodologique proposé aux collectivités locales afin de guider le choix des implantations nouvelles de tels établissements.
    Lorsqu’un établissement recevant des populations sensibles telles que définies au point 2 sera implanté ou fera l’objet de travaux d’extension sur un ancien site industriel, et notamment lorsque des pollutions résiduelles nécessiteront la mise en place de servitudes ou de moyens de surveillance, vous veillerez à ce que le maître d’ouvrage organise, le moment venu, en direction des gestionnaires de ces établissements ainsi que des représentations locales de leur tutelle (ministères, collectivités, associations...), mais également en direction des représentants des populations accueillies et des personnels amenés à y travailler, une information portant sur les opérations de réhabilitation mises en oeuvre ainsi que, le cas échéant, sur les moyens de surveillance environnementale prévus.

4.  Contribution des services de l’Etat

    Lorsqu’une installation classée est définitivement mise à l’arrêt, au terme du processus de concertation entre l’exploitant, le propriétaire du site et le maire, processus désormais régi par les articles 34-2 et suivants du décret no 77-1133 du 21 septembre 1977, vous disposez du pouvoir d’imposer, par voie d’arrêté complémentaire, les travaux et mesures de surveillance rendus nécessaires par le nouvel usage.
    Mais il convient de rappeler que la gestion des risques éventuels liés aux terrains relève de la responsabilité des maîtres d’ouvrage, au regard notamment du code civil, et que les services de l’Etat, si leur avis peut être sollicité, ne peuvent pas, en application du droit actuel de l’urbanisme, imposer au demandeur d’un permis de construire les mesures détaillées à l’annexe III.
    De même, le pouvoir et la responsabilité des maires en matière de délivrance du permis de construire restent entiers. Ainsi, si les éléments disponibles permettent de penser que la création d’un établissement peut entraîner des risques pour ses futurs occupants, il convient d’appeler l’attention des maires sur les dispositions des articles R. 111-2 et R. 111-3-1 du code de l’urbanisme qui permettent, dans un tel cas, de refuser le permis de construire.
    Toutefois, en ce qui concerne les établissements accueillant des populations sensibles visés par la présente circulaire, dans tous les cas où le maître d’ouvrage aura à solliciter un permis de construire ou une autorisation de travaux (exclusivement dans le cas d’une création ou d’une extension d’un établissement), je vous demande de veiller à ce que le service instructeur (DDE la plupart du temps, mais également les services techniques communaux lorsqu’ils existent) recueille l’avis des services de l’Etat concernés, à savoir les DRIRE et les DDASS.
    L’avis sera rendu par la DRlRE, dans le cas des sites ayant accueilli des installations classées, et par la DDASS dans les autres cas.
    Avant de rendre leur avis, les services ainsi consultés pourront réclamer, si nécessaire, les conclusions de l’examen critique de l’expert indépendant tel qu’il est défini à l’annexe III.
    Quel que soit le cas de figure, vous veillerez à garantir la cohérence de l’action des services de l’Etat sur ce problème spécifique, en obtenant que les services de l’inspection des installations classées, les services amenés à instruire les permis de construire et les services de la santé mutualisent leurs compétences respectives. Si nécessaire, vous mettrez en place une instance de concertation qui fonctionnera sous votre autorité.
    Je vous rappelle également que vous pouvez vous reporter en cas de nécessité aux dispositions de l’article L. 2215-1 du code des collectivités.
    Vous voudrez bien diffuser cette circulaire aux services de l’Etat et aux collectivités territoriales concernés, et me faire part des difficultés que vous pourriez rencontrer pour entourer les projets d’établissements accueillant des populations sensibles de toutes les précautions indispensables.

Pour le ministre :
Le directeur général de la santé,
D.  Houssin

Pour la ministre :
Le directeur de la prévention
des pollutions et des risques,
délégué aux risques majeurs,
L.  Michel

Pour le ministre :
Le directeur général de l’urbanisme
de l’habitat et de la construction,
Le directeur,
adjoint au directeur général
de l’urbanisme, de l’habitat
et de la construction,
P.  Lelarge

ANNEXE  I

ÉLÉMENTS SANITAIRES JUSTIFIANT LE CHOIX DES POPULATIONS SENSIBLES DANS LE CADRE D’IMPLANTATION D’ÉTABLISSEMENTS SUR DES SITES POLLUÉS
    Pour définir les populations sensibles, la direction générale de la santé a retenu deux critères : la voie d’exposition et la durée de l’exposition.

ENFANTS
1.  Voies d’exposition

    Deux voies d’exposition doivent principalement être prises en compte : l’ingestion et l’inhalation. Le contact cutané peut être considéré comme une voie mineure d’exposition par les sols pollués.
    L’exposition par ingestion concerne surtout les enfants en bas âge (de un à six ans) qui ont des comportements spécifiques et absorbent généralement plus de poussière ou de terre que des adultes. C’est pourquoi une attention particulière sera portée aux aires de jeu mises à disposition des jeunes enfants au sein des établissements qui les accueillent.
    L’exposition par inhalation concerne essentiellement les jeunes enfants (< dix ans) pour les atteintes respiratoires et les adolescents pour les perturbations endocriniennes (phase pubertaire allant d’environ dix ans chez les filles à dix-sept ans chez les garçons).

2.  Durée d’exposition

    Ce paramètre est particulièrement important dans le cas des expositions chroniques à des polluants présents à faible ou très faible dose.
    Les enfants sont, pour la plupart, accueillis en crèches, écoles maternelles, primaires, collèges et lycées pendant la journée. Par ailleurs, en moins grand nombre, des enfants sont accueillis de jour, voire en hébergement complet, dans des structures spécialisées relevant du secteur médico-social ou médico-éducatif.

ADULTES
1.  Voies d’exposition

    Seule l’exposition par inhalation est retenue.
    Chez les adultes, les populations habituellement reconnues comme sensibles sont les personnes présentant des problèmes respiratoires ou cardio-vasculaires, les personnes pratiquant des sports augmentant le débit respiratoire, les femmes enceintes pour les risques de tératogénicité. L’exposition par inhalation est liée au séjour dans des locaux confinés ou mal aérés. A l’inverse, la fréquentation des espaces laissés à l’air libre ne présente aucun facteur de risque.

2.  Durée d’exposition

    Les personnes présentant des pathologies spécifiques, lorsqu’elles sont hospitalisées, le sont, sauf exception, pour des séjours de courte durée. De ce fait, il ne semble pas justifié de retenir en première intention les établissements de soins de court séjour (hôpitaux ou cliniques privées).
    S’agissant des personnes âgées, lorsqu’elles sont admises en long séjour ou placées en institution médico-sociale (maison de retraite), la durée de séjour reste en moyenne inférieure à deux ans. Quant aux femmes enceintes, leur séjour dans les services de maternité est de courte durée (la durée moyenne de séjour est d’environ trois jours). Compte tenu de ces éléments, le risque d’exposition chronique de ces catégories de population est peu probable et il n’y a donc pas lieu de retenir ici ces établissements en priorité.

CONCLUSIONS

    L’ensemble de ces considérations a conduit à considérer en priorité les établissements suivants comme « établissements accueillant des populations sensibles » :
    -  les crèches, les écoles maternelles et élémentaires, les établissements d’hébergement d’enfants handicapés relevant du domaine médico-social ainsi que les aires de jeux et les espaces verts qui leur sont attenants ;
    -  les collèges et les lycées.
    Les établissements ou les locaux ou sein des établissements ci-dessus définis, tels que les centres ou lieux sportifs, dans lesquels les populations sont amenées à séjourner occasionnellement, quelques heures par semaine, ne sont pas concernés.

ANNEXE  II
INVENTAIRES PERMETTANT DE CONNAÎTRE
LE PASSÉ INDUSTRIEL OU L’ÉTAT DE POLLUTION D’UN SITE

    Le retour d’expérience, tant en France qu’à l’étranger, permet de constater que ce n’est pas tant la présence de polluants dans les sols qui est problématique en termes de risque, mais le fait que cette pollution soit mobilisable naturellement (diffusée par les eaux souterraines par exemple) ou par de nouvelles activités humaines et donc susceptible d’affecter l’environnement ou une population exposée.
    Le ministère de l’écologie et du développement durable a mis en place deux types d’inventaires nationaux afin de garder la mémoire (ou la reconstituer) des sites pollués ou qui peuvent l’être, de sorte qu’un nouvel aménagement puisse être précédé des études et travaux nécessaires au maintien de la protection de l’environnement et des populations.
    Ces inventaires sont accessibles sur internet :
    a)  Celui des sites (BASOL) appelant une action des pouvoirs publics à titre préventif ou curatif (http://bosol.environnement.gouv.fr). Cette base de données est le tableau de bord des actions menées par l’administration et les responsables de ces sites pour prévenir les risques et les nuisances. ll comprend à ce jour environ 3 800 sites et est régulièrement actualisé.
    b)  Les inventaires historiques qui ont vocation à reconstituer le passé industriel d’une région. Les informations collectées alimentent la base de données BASlAS (http://bosios.brgm.fr). Cette dernière a été conçue pour être interrogeable tant à l’échelon régional qu’au niveau national. Sa finalité est de conserver la mémoire des sites inventoriés pour fournir des informations utiles à la planification urbanistique et à la protection de l’environnement. Elle a aussi pour objectif d’aider les propriétaires et/ou détenteurs de sites, aménageurs, notaires, etc., à assumer le devoir de vigilance prévu, notamment, par l’article L. 514-20 du code de l’environnement.
    Cet inventaire n’est actuellement pas exhaustif mais devrait être achevé, pour l’essentiel des départements, en 2006-2007 et contenir de 300 000 à 400 000 sites. Aujourd’hui, les inventaires de 76 départements sont en ligne.

ANNEXE  III
MESURES DE GESTION DES SITES

    Dans le cas où, compte tenu de contraintes urbanistiques ou sociales, un site alternatif non pollué ne pourrait être choisi, le maître d’ouvrage aura à mettre en oeuvre des mesures de nature organisationnelle et technique.

Etablissement d’un diagnostic et définition
des mesures de gestion

    Le maître d’ouvrage doit confier à des prestataires spécialisés dans ce domaine l’ensemble des étapes du dossier, comprenant le diagnostic approfondi caractérisant de manière suffisante l’état de pollution du site, et la détermination des travaux de réhabilitation à mener afin que le projet soit acceptable en termes de sécurité sanitaire.
    En préambule, il convient de rappeler que pour qu’un site pollué présente un risque, il faut la combinaison simultanée des trois éléments suivants :
    -  une source de pollution contenant des polluants mobilisables ;
    -  des voies de transfert : il s’agit des différents milieux (les sols, les eaux souterraines...) qui, au contact de la pollution primaire, ont pu être pollués pour devenir des sources secondaires de pollution ou, ont pu simplement propager la pollution primaire ;
    -  la présence de personnes susceptibles d’être exposées à ces pollutions.
    Si cette combinaison n’est pas réalisée, c’est-à-dire s’il est établi qu’il n’y a pas de possibilité de mise en contact direct ou indirect entre la source de pollution et les populations à protéger, la pollution ne présente pas de risques, dans la mesure où sa présence est identifiée et conservée dans les mémoires.
    Aussi, sur la base des résultats d’un diagnostic approfondi caractérisant l’état de pollution des milieux, les modalités de réhabilitation d’un site en cas de changement d’usage conduisent, dans les grandes lignes :
    -  à excaver les zones fortement chargées en polluants, à pomper et à évacuer les flaques de produits flottants vers une filière de gestion appropriée ;
    -  s’agissant de la pollution diffuse restante, à définir des options de gestion ou de réhabilitation basées sur une approche coûts/avantages tenant notamment compte des mesures de gestion qui permettent d’éviter toute exposition résiduelle des populations aux pollutions ;
    -  si des expositions résiduelles subsistent, à vérifier leur acceptabilité par des évaluations quantitatives des risques sanitaires (pour que la réhabilitation soit valide, il faut que les indices ou les excès de risques soient inférieurs à la valeur repère conventionnelle de 1 pour les effets à seuil et à la valeur repère souvent retrouvée de 10-s pour les effets sans seuil. Les valeurs repères sont utilisées au niveau mondial par les autorités en charge de la protection de la santé dans le cadre des évaluations quantitatives des risques sanitaires) ;
    -  à vérifier que les niveaux résiduels de pollution mesurés in situ après les opérations de dépollution sont effectivement ceux qui sont attendus, et à mettre en place une surveillance environnementale, le cas échéant, dont le programme est réajusté en fonction des résultats obtenus ;
    -  à instaurer des servitudes si des pollutions résiduelles subsistent après traitement, que ces pollutions soient confinées ou non.
    Les solutions retenues peuvent varier en fonction des polluants présents.
    Lorsque les substances en cause sont des solvants, des hydrocarbures et, d’une manière plus générale, des substances susceptibles d’être émises sous forme de vapeurs toxiques, les lieux clos pouvant les confiner, les concentrer et créer ainsi des expositions résiduelles potentiellement problématiques, nécessitent la plus grande attention.
    Une mesure de gestion simple, complémentaire aux opérations de dépollution, consiste à couper toute possibilité d’exposition à ces pollutions résiduelles en construisant les locaux fréquentés par les populations sensibles sur des vides sanitaires largement ventilés naturellement ou mécaniquement.
    Lorsque des pollutions métalliques non susceptibles de présenter un impact environnemental sont présentes sur le site à aménager, dans la mesure où les sols pollués seront recouverts par des constructions ou des « terres propres » en épaisseur suffisante, ces pollutions ainsi confinées, dont la dissémination n’est plus possible, ne présentent plus de risques sanitaires pour les personnes. Par contre, il est essentiel de garder la mémoire de leur présence en instaurant des servitudes pour éviter que des travaux ne viennent les ramener à la surface. La mise en place de membranes géotextiles ou de dispositifs de couleur délimitant l’horizon les terres polluées du site avant leur recouvrement par des terres non polluées de recouvrement apparaît nécessaire.
    Sur le plan pratique, le bilan coûts/avantages, prenant en compte l’ensemble des enjeux du projet, va conduire à identifier la solution la plus viable :
    -  s’agissant de l’excavation de l’ensemble des pollutions, qui peut conduire à ne pas mettre en place de servitudes, les enjeux à considérer sont notamment la présence d’un lieu d’accueil pour les pollutions excavées, les coûts liés au transport et au stockage ;
    -  si les pollutions sont confinées sur place, c’est-à-dire dans la mesure où leur impact est maîtrisé tant sur le plan environnemental que sur le plan sanitaire, cette donnée environnementale est à prendre en compte en tant que contrainte d’exploitation à part entière par le biais d’une surveillance environnementale et/ou de servitudes.

Contrôle des opérations de dépollution

    Le retour d’expérience des chantiers de réhabilitation montre souvent des dysfonctionnements dans la réalisation effective des travaux de dépollution qui s’avèrent, au final, non conformes aux options de gestion initialement définies.
    Aussi, le maître d’ouvrage doit organiser le contrôle des travaux de dépollution des sols afin de s’assurer qu’ils sont réalisés conformément aux dispositions prévues, et ceci au fur et à mesure de leur avancement.
    Selon le cas, il peut s’agir des services techniques d’une collectivité territoriale ou d’un organisme indépendant (bureau d’études ou assimilé), diagnostic et contrôle des travaux de dépollution pouvant être cumulés. Mais dans tous les cas, ce « contrôleur » est indépendant du prestataire qui a la charge de mener les opérations de dépollution.
    En particulier, il détermine les actions correctives à mettre en oeuvre lorsque des écarts sont constatés.
    A l’issue des travaux de dépollution, il établit un rapport final accompagné d’une synthèse récapitulant l’ensemble des contrôles réalisés et précisant, pour chacune des substances identifiées dans les études, les seuils de dépollution effectivement atteints en les comparant aux seuils qui étaient prévus.
    Ces éléments doivent permettre de finaliser, lorsque cela s’avère nécessaire, le programme définitif de surveillance environnementale à mettre en oeuvre dès l’achèvement des aménagements.

Examen critique par un expert indépendant

    Par ailleurs, dans certains cas, les services de l’Etat peuvent être amenés à réclamer de recourir, aux frais du maître d’ouvrage, à un expert indépendant, autre que les prestataires impliqués dans les études, les travaux de réhabilitation ou le contrôle de ces mêmes travaux.
    Cet expert indépendant est chargé de procéder à un examen critique de l’ensemble des éléments du projet.
    Il doit examiner, en tout premier lieu, la pertinence et la qualité des diagnostics réalisés pour caractériser la nature et l’ampleur de la pollution des milieux. En effet, il convient de rappeler toute l’importance de ces diagnostics sur lesquels repose complètement la définition des mesures appropriées de gestion et d’aménagement du site en fonction de l’usage futur envisagé. De même, les évaluations approfondies de toutes natures qui peuvent s’avérer nécessaires n’ont de sens que sur la base de diagnostics correctement réalisés.
    Dès que le maître d’ouvrage a arrêté le choix de l’expert, il organise une réunion de cadrage initiale au cours de laquelle le champ et le déroulement de l’examen critique sont définis. En effet, la réalisation de tels projets correspond à des chantiers de longue durée et il apparaît judicieux que l’examen critique accompagne par étapes l’avancement de l’ensemble du projet. Les conclusions de cette réunion de cadrage sont formalisées et adressées à l’ensemble des parties concernées.
    Les principales étapes de cet examen critique sont notamment les suivantes :
    -  avant leur réalisation, l’expert en charge de l’examen critique se prononce sur la pertinence des diagnostics envisagés pour caractériser la nature et l’ampleur de l’état de pollution des milieux au regard des usages envisagés et des options de gestion à ce stade retenues ;
    -  au regard des résultats des diagnostics quand ils sont achevés, l’expert se prononce :
        -  sur leur validité et, le cas échéant, sur la nature des évaluations complémentaires, y compris en termes de diagnostics, qui peuvent s’avérer nécessaires ;
        -  sur la pertinence des options de gestion et des seuils de dépollution résultant des évaluations quantitatives des risques quant elles sont nécessaires ;
        -  sur les actions de vérification qu’il souhaite réaliser in situ en complément des opérations confiées au « contrôleur » ;
    -  à la réception du rapport final récapitulant l’ensemble des contrôles réalisés et précisant les seuils de dépollution effectivement atteints, en tenant compte des résultats de ses propres actions de vérification, l’expert émet un avis définitif sur :
        -  la compatibilité des usages envisagés au regard des seuils de dépollution effectivement atteints ;
        -  la nature et la fréquence du programme définitif de surveillance environnementale proposé par le responsable du projet ;
        -  les mesures qui doivent être pérennisées par le biais de servitudes d’utilité publique.
    Une réunion de clôture accompagne la remise des conclusions de cet examen critique. Les suites réservées à ces conclusions sont arrêtées au cours de cette réunion. Elle donne également lieu à un compte rendu formel adressé à l’ensemble des parties concernées.

Mise en place de servitudes,
précautions d’usage

    Dans certains cas, il peut être nécessaire d’instaurer des servitudes d’utilité publique ou des dispositions équivalentes sur les sites ainsi réaménagés en vue d’accueillir des populations sensibles, non seulement pour conserver la mémoire des pollutions résiduelles dans les documents d’urbanisme, mais aussi pour que les gestionnaires, propriétaires et utilisateurs de ces établissements intègrent pleinement cette donnée environnementale en tant que donnée d’exploitation à part entière.
    Ces servitudes permettent également d’assurer la pérennité des mesures de gestion mises en oeuvre sur le site réhabilité, lorsque des précautions d’usage sont nécessaires.
    Par exemple, lorsqu’une surveillance environnementale est prévue, le programme de surveillance comporte des prélèvements et des analyses régulières dans les différents milieux de l’environnement et dans des locaux représentatifs régulièrement fréquentés par les populations sensibles.
    Au regard des résultats des campagnes de mesures sur quatre ans, un bilan est établi. Si ce bilan confirme une stabilisation ou une diminution régulière des expositions, de nouvelles modalités de surveillance environnementale sont étudiées en considérant une fréquence de prélèvements allégée et des paramètres de surveillance plus ciblés. La surveillance est arrêtée lorsque cela est justifié.