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Dispositions spécifiquesaux différents types d'aide sociale

Aide sociale aux personnes âgées (ASPA)

Mots clés : Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) – Hébergement – Habilitation – Prise en charge

Dossier no 130174

M. X…

Séance du 25 juin 2014

Décision lue en séance publique le 20 mai 2015

Vu, enregistrée au greffe de la commission centrale d’aide, sous le numéro 130174, la requête présentée le 11 avril 2013 par l’Association tutélaire des majeurs protégés de l’Ain, en charge de la mesure de protection de M. X…, tendant à l’annulation de la décision de la commission départementale d’aide sociale de l’Ain du 29 novembre 2012 confirmant la décision du Président du conseil général de l’Ain qui rejette l’admission de M. X… au bénéfice de l’aide sociale à l’hébergement en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes aux motifs que l’établissement n’est pas habilité à recevoir les bénéficiaires de l’aide sociale à l’hébergement ;

La requérante soutient que M. X… réside depuis plus de onze ans à la maison de retraite « R… », un changement serait préjudiciable et un déplacement dans un autre établissement compromettrait son état de santé ; que par décision du 20 mai 2011, la commission centrale d’aide sociale a relevé que l’emploi du verbe « pouvoir » par le législateur ne revêt pas un sens différent à l’article L. 235‑1 du code de l’action sociale et des familles de celui qu’il prend dans les autres dispositions du chapitre premier qui utilisent également le verbe pouvoir ; que l’emploi du terme « pouvoir » ne suffit donc pas à justifier que le bénéfice de l’aide sociale soit refusé à M. X… alors qu’il remplissait les conditions prévues par l’article L. 231‑5 du code de l’action sociale et des familles de placement pendant cinq années à titre payant dans un établissement non habilité à l’aide sociale ; que d’ailleurs la commission centrale d’aide sociale a rappelé dans la même décision que « la collectivité débitrice de l’aide sociale prend en charge les frais de séjour d’une personne âgée résidant dans un établissement privé non habilité par convention à recevoir des bénéficiaires de l’aide sociale dès lors que le pensionnaire est impécunieux et a résidé à titre payant au moins cinq ans dans l’établissement non conventionné, cette condition n’étant assortie d’aucun critère d’âge ou de qualité » ; que la commission départementale d’aide sociale de l’Ain par décision du 15 mars 2012 a octroyé sur ce fondement le bénéfice de l’aide sociale à une personne hébergée dans un établissement non habilité à l’aide sociale, dans la limite du tarif des établissements publics de référence ; que concernant la prise en charge de la différence entre le coût de l’établissement « R… » et le coût d’un établissement public, M. X… dispose de 70 088 euros d’épargne, cette épargne permettrait à M. X… de régler la partie non prise en charge par l’aide sociale soit 642,71 euros mensuels, d’après le calcul effectué par le conseil général de l’Ain soit pendant 9 ans ; que dans sa décision du 20 mai 2011, la commission centrale d’aide sociale a précisé que « les considérations de politique départementale » évoquées par le conseil général pour refuser le bénéfice de l’aide sociale sont inopérantes :

Vu la décision attaquée ;

Vu le mémoire en défense du président du conseil général de l’Ain qui conclut au maintien de la décision et préconise un changement d’établissement pour M. X… ; il soutient que l’emploi du verbe pouvoir dans la législation française indique bien une possibilité et non une obligation ; qu’une obligation résulte de l’emploi du présent de l’indicatif avec un autre verbe que pouvoir ; que la décision de la commission centrale d’aide sociale du 20 mai 2011 précise également que « l’emploi du verbe pouvoir par le législateur ne revêt pas un sens différent à l’article L. 231‑5 de celui qu’il prend dans les autres dispositions précitées, qu’il a pour objet de rappeler le caractère subsidiaire de l’aide sociale » ; qu’il convient d’indiquer qu’en cas de placement d’une personne âgée dans un établissement l’article L. 231‑4 du code de l’action sociale et des familles transcrit en priorité légale le recours à un placement dans des structures publiques habilitées par convention à recevoir des bénéficiaires de l’aide sociale, le recours à l’établissement privé ne devant intervenir qu’à défaut ; que cette disposition a été confirmée par une décision de la commission centrale d’aide sociale du 18 octobre 2010 qui précise que « c’est à juste titre qu’une décision de la commission départementale d’aide sociale a rejeté la demande d’aide sociale et préconisé, eu égard aux dispositions précitées de l’article L. 231‑5 susvisé, l’orientation de la personne âgée vers un établissement public habilité à l’aide sociale » ; qu’aussi par décision en date du 4 septembre 2006, la commission centrale d’aide sociale indique que « ne peut prétendre au bénéfice de l’aide sociale pour la prise en charge de ses frais de séjour, la personne âgée qui est admise dans un établissement privé n’ayant pas passé de convention avec le service d’aide sociale » ; que par conséquent, le conseil général n’a aucune obligation de prendre en charge au titre de l’aide sociale une personne âgée hébergée dans un établissement non habilité à recevoir des bénéficiaires de l’aide sociale ; que la décision de la commission centrale d’aide sociale du 18 octobre 2010 précise également que « dans le cas où le déficit réel est supérieur au déficit pouvant être pris en charge par le département, le rejet de l’aide sociale au motif que l’établissement n’est pas habilité à recevoir des bénéficiaires de l’aide sociale est maintenu » ; qu’en l’espèce le montant du déficit réel mensuel de 1 381,74 euros équivaut approximativement au double du coût qu’aurait occasionné son placement dans un établissement public cité auparavant, soit une différence de 642,71 euros par mois ; que la collectivité ne peut donc pas participer à la prise en charge d’une personne âgée hébergée dans un établissement privé non habilité à recevoir des bénéficiaires de l’aide sociale dans le cas où le déficit réel excède le tarif de l’aide sociale en vigueur pour les établissement habilités analogues ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Vu le code de la famille et de l’aide sociale ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu les décisions du Conseil constitutionnel no 2010‑110 QPC du 25 mars 2011, notamment l’article 1er de son dispositif et ses considérants 7 et 10, et no 2012‑250 QPC du 8 juin 2012, notamment l’article 1er alinéa 3 de son dispositif ;

Vu l’acquittement de la contribution pour l’aide juridique d’un montant de 35 euros due par toute personne saisissant la commission centrale d’aide sociale depuis le 1er octobre 2011 en application de l’article 1635 bis Q du code général des impôts ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celles d’entre elles ayant exprimé le souhait d’en faire usage ayant été informées de la date et de l’heure de l’audience ;

Après avoir entendu à l’audience publique du 25 juin 2014, Mme SOUCHARD, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 231‑5 du code de l’action sociale et des familles : « Le service d’aide sociale aux personnes âgées peut participer aux frais de séjour d’une personne âgée dans un établissement d’hébergement avec lequel il n’a pas été passé de convention lorsque l’intéressé y a séjourné à titre payant pendant une durée de cinq ans et lorsque ses ressources ne lui permettent plus d’assurer son entretien. Le service d’aide sociale ne peut pas, dans cette hypothèse, assumer une charge supérieure à celle qu’aurait occasionnée le placement de la personne âgée dans un établissement public délivrant des prestations analogues, selon les modalités définies par le règlement départemental d’aide sociale. » ;

Considérant qu’un dossier de demande d’aide sociale concernant M. X… a été signé par l’Association tutélaire des majeurs protégés le 18 janvier 2012 ; que le président du centre communal d’action sociale a émis un avis favorable à cette demande ; que par décision du 22 mars 2012, le président du conseil général a rejeté la demande de M. X… au motif que l’établissement « R… » n’est pas habilité à recevoir des bénéficiaires de l’aide sociale à l’hébergement ;

Considérant que M. X… a sollicité le bénéfice de l’aide sociale aux personnes âgées pour la prise en charge de ses frais d’hébergement à la résidence « R… » où il réside depuis le 6 février 2001 à titre payant ; que la psychologue qui suit M. X… a rédigé un courrier en date du 29 novembre 2011 afin d’exposer la situation de ce dernier ; qu’elle explique que M. X… a pu au fil du temps trouver des repères stables au sein de la maison de retraite et qu’un éventuel changement d’établissement l’angoisse beaucoup ; qu’elle conclut en précisant qu’un changement dans les habitudes de M. X… lui serait très néfaste ;

Considérant que par courrier du 6 avril 2012, l’Association tutélaire des majeurs protégés de l’Ain forme un recours contre cette décision ; que cette dernière précise que M. X… est résident depuis le 6 février 2001 dans cet établissement à titre payant ; que la commission départementale d’aide sociale de l’AIN rejette le recours au motif que l’établissement « R… » n’est pas habilité à recevoir des bénéficiaires de l’aide sociale à l’hébergement ;

Considérant que le prix de journée moyen des établissements publics était fixé, par arrêté du président du conseil général de l’AIN pour l’année 2012, à 49,45 euros par jour ; que le coût du placement dans un établissement délivrant des prestations analogues, constituant la référence prévue par l’article L. 231‑5 susvisé, s’élève donc sur la base des tarifs mensuels arrêtés en maison de retraite pour 30 jours à 1 483,50 euros ; qu’à la date de la demande (janvier 2012), les frais mensuels d’hébergement à la maison de retraite « R… » s’élevaient à 2 293,71 euros ;

Considérant que M. X… remplissait, à la demande d’aide, les conditions prévues par l’article L. 231‑5 susvisé de placement pendant 5 ans à titre payant dans un établissement non habilité à recevoir des bénéficiaires de l’aide sociale pour prétendre au bénéfice de cette aide ; qu’exception faite des capitaux, le montant de ressources tel qu’évalué, lors de l’instruction de sa demande, après prélèvement du minimum de 10 % dont il devait disposer, qui peut être affecté au règlement de ses frais d’hébergement, s’élève à 933,98 euros ; qu’en l’absence de mention d’obligés alimentaires, le montant des frais d’hébergement facturés par la maison de retraite restant à couvrir s’élevait à 1 381,74 euros ;

Considérant qu’en l’espèce et conformément au second alinéa de l’article L. 231‑5 susvisé, le département n’est habilité à ne prendre en charge le déficit de ressources de M. X… qu’à hauteur de 739,03 euros correspondant à la charge d’un placement dans un établissement public délivrant des prestations analogues, d’après le règlement départemental de l’aide sociale de l’Ain ; que, dans ces conditions, M. X… ne peut prétendre au bénéfice d’une prise en charge totale des frais d’hébergement restant à couvrir dans un établissement non habilité à recevoir des bénéficiaires de l’aide sociale ; que c’est à juste titre que par décision, en date du 29 novembre 2012, la commission départementale de l’Ain a rejeté sa demande d’aide sociale et a préconisé, eu égard aux dispositions précitées de l’article L. 231‑5 susvisé, l’orientation de M. X… vers un établissement public habilité à l’aide sociale ; que, dès lors, le recours doit être rejeté,

Décide

Art. 1er.  Le recours de l’Association tutélaire des majeurs protégés de l’Ain est rejeté.

Art. 2.  La présente décision sera notifiée à l’Association tutélaire des majeurs protégés du département de l’Ain, au conseil général de l’Ain. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 25 juin 2014 où siégeaient M. SELTENSPERGER, président, Mme GUIGNARD-HAMON, assesseure, Mme SOUCHARD, rapporteure.

Décision lue en séance publique le 20 mai 2015.

La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président La rapporteure

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

Marie-Christine Rieubernet