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Dispositions spécifiques aux différents types d'aide sociale

Aide sociale aux personnes âgées (ASPA)

Placement en établissement

Mots clés : Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) – Placement – Ressources – Obligation alimentaire – Administration – Compétence

Dossier no 130397

Mme X…

Séance du 23 septembre 2014

Décision lue en séance publique le 24 septembre 2014

Vu le recours formé le 12 juillet 2013 par l’association T… tendant à l’annulation de la décision de la commission départementale d’aide sociale du Pas-de-Calais réunie le 12 avril 2013 ayant confirmé la décision prononcée par le président du conseil général le 14 décembre 2012 de rejet de la demande de prise en charge des frais de placement de Mme X… compte tenu des ressources augmentées de l’aide possible des obligés alimentaires ;

La requérante souligne l’illégalité de la décision du président du conseil général qui a motivé le rejet de la demande d’aide sociale avec la mention « compte tenu des ressources et de l’aide possible des enfants » ; qu’elle affirme que Mme X… perçoit 1 085,53 euros de ressources pour des charges mensuelles de 2 298,12 euros et que ses enfants et obligés alimentaires, M. P… et M. M…, ont refusé de renvoyer le formulaire d’obligation alimentaire comportant leurs ressources et leurs charges ; qu’il était par conséquent impossible au président du conseil général d’apprécier leurs situations actuelles ;

Vu la décision attaquée ;

Vu le mémoire en défense du président du conseil général du Pas-de-Calais enregistré le 24 mars 2014 qui, en application du barème départemental du calcul des obligés alimentaires, émet un avis défavorable à la requête de l’association ; il précise que les ressources de Mme X… s’élèvent à 1 179,34 euros pour des frais mensuels de séjour d’un montant de 1 702,50 euros et un restant à couvrir de 678,56 euros par mois ; que parmi les trois enfants de Mme X…, M. C… a des revenus mensuels de 776 euros correspondant à l’allocation pour adulte handicapé, M. M… a des revenus mensuels de 4 821 euros et M. P… a des revenus mensuels de 2 936 euros ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Vu la décision du juge aux affaires familiales du 7 janvier 2014 qui fixe la pension alimentaire due par les enfants de Mme X… au titre de devoirs de secours à 425 euros par mois ;

Vu les décisions du Conseil constitutionnel no 2010‑110 QPC du 25 mars 2011, notamment l’article 1er de son dispositif et ses considérants 7 et 10, et no 2012‑250 QPC du 8 juin 2012, notamment l’article 1er alinéa 3 de son dispositif ;

Vu l’acquittement de la contribution pour l’aide juridique d’un montant de 35 euros due par toute personne saisissant la commission centrale d’aide sociale depuis le 1er octobre 2011 en application de l’article 1635 bis Q du code général des impôts ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celles d’entre elles ayant exprimé le souhait d’en faire usage ayant été informées de la date et de l’heure de l’audience ;

Après avoir entendu à l’audience publique du 23 septembre 2014, Mme GOMERIEL, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 132‑6 du code de l’action sociale et des familles : « Les personnes tenues à l’obligation alimentaire instituée par les articles 205 et suivants du code civil sont, à l’occasion de toute demande d’aide sociale, invitées à indiquer l’aide qu’elles peuvent allouer aux postulants et à apporter, le cas échéant, la preuve de leur impossibilité de couvrir la totalité des frais. (…) La proportion de l’aide consentie par les collectivités publiques est fixée en tenant compte du montant de la participation éventuelle des personnes restant tenues à l’obligation alimentaire. La décision peut être révisée sur production par le bénéficiaire de l’aide sociale d’une décision judiciaire rejetant sa demande d’aliments ou limitant l’obligation alimentaire à une somme inférieure à celle qui avait été envisagée par l’organisme d’admission. (…) » ; qu’aux termes de l’article L. 132‑7 du même code : « En cas de carence de l’intéressé, le représentant de l’Etat ou le président du conseil général peut demander en ses lieu et place à l’autorité judiciaire la fixation de la dette alimentaire et le versement de son montant, selon le cas, à l’Etat ou au département qui le reverse au bénéficiaire, augmenté le cas échéant de la quote-part de l’aide sociale » ; qu’aux termes de l’article 205 du code civil : « Les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin » ;

Considérant par ailleurs que la circonstance que le dossier de demande d’aide sociale soit incomplet du fait de l’absence de renseignements concernant certains obligés alimentaires ne peut faire échec à l’admission à l’aide sociale, d’une part parce que l’administration est en mesure de procéder à des recherches dans l’intérêt des familles ou de procéder à des recoupements avec les données fiscales, d’autre part parce qu’il appartient en tout état de cause au président du conseil général, si la carence des intéressés est avérée, de saisir l’autorité judiciaire afin de fixer le montant éventuel de la dette alimentaire ;

Considérant que Mme X… est entrée à l’EHPAD E… le 8 mars 2011 ; qu’après instruction de la demande de prise en charge des frais de placement, le président du conseil général a rejeté la demande d’aide sociale le 14 décembre 2012 ; que le 27 février 2013, l’association T… a formé un recours pour insuffisance de motivation devant la commission départementale d’aide sociale qui a confirmé la décision prononcée par le président du conseil général du Pas-de-Calais selon les mêmes motivations ; que le juge aux affaires familiales a fixé à 425 euros par mois la participation de M. M… et à 425 euros par mois celle de M. P… ;

Considérant qu’il ressort de la décision du juge aux affaires familiales du 7 janvier 2014 que les ressources de Mme X… ont été estimées à 1 286 euros ; que les frais d’hébergement atteignant la somme de 1 857 euros et les dépenses personnelles 265 euros par mois, elle ne pouvait financer son hébergement ; qu’après déduction des 10 % de reste à vivre, il restait 850 euros à couvrir au titre de ses frais d’hébergement ; que le président du conseil général a décidé que les obligés alimentaires de Mme X… pouvaient financer ce qu’il restait à couvrir « compte tenu des ressources et de l’aide possible des enfants » sans avoir eu connaissance des ressources des obligés alimentaires ; que cette mention est insuffisante et incomplète au regard des exigences législatives et jurisprudentielles ; qu’il est nécessaire de statuer explicitement pour permettre au juge d’appel d’exercer son contrôle ;

Considérant que le juge aux affaires familiales est le juge naturel de l’obligation alimentaire ; qu’il a, dans sa décision du 7 janvier 2014, estimé qu’au regard des ressources et des charges de M. et Mme M… et de M. et Mme P…, fixé la répartition de la contribution alimentaire aux besoins d’aliments de Mme X… à 425 euros pour M. et Mme P… et 425 euros pour M. et Mme M… ; que la commission centrale d’aide sociale est tenue par cette décision,

Décide

Art. 1er Ensemble sont annulées les décisions des 12 avril 2013 de la commission départementale d’aide sociale du Pas-de-Calais et 14 décembre 2012 du président du conseil général du Pas-de-Calais.

Art. 2.  Mme X… est admise au bénéfice de l’aide sociale pour son séjour à l’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes E… depuis le 8 mars 2011.

Art. 3.  La présente décision sera notifiée à l’association T…, au président du conseil général du Pas-de-Calais. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 23 septembre 2014 où siégeaient M. SELTENSPERGER, président, M. CENTLIVRE, assesseur, Mme GOMERIEL, rapporteure.

Décision lue en séance publique le 24 septembre 2014.

La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le présidentLa rapporteure

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

Marie-Christine Rieubernet